En République démocratique du Congo, les morts ne se valent pas. Sinon, comment expliquer l’omerta des autorités congolaises après la mort de plus de 300 civils dans un intervalle d’une semaine?
En effet, l’attitude des dirigeants face aux drames qui frappent la République laissent perplexe. Dans la capitale, tout se passe comme si de rien n’était alors que le sang des Congolais coule à flot.
Par exemple, 215 civils ont péri au cours de la semaine qui s’est achevée dans la région de Beni et de Lubero, au Nord-Kivu dans des attaques ADF. A ce sujet, le gouvernement s’est contenté d’un communiqué ramassé qui minimise d’ailleurs le bilan des victimes, allant de 215 morts à 41 seulement, selon lui.
Depuis, plus rien a suivi. La vie a continué son cours normal : ni aide, ni intervention de l’Etat. Rien du tout. D’ailleurs, la présidence de la République n’y a jamais fait allusion de sorte qu’il est légitime de se demander si ceux qui sont morts étaient des Congolais ou des sous-Congolais.
Dans la foulée, une baleinière a chaviré dans le Mai-ndombe. Une centaine de Congolais ont péri dans cette tragédie. Là encore, la présidence de la République s’est limitée à formuler quelques compassions sans aller plus loin, ni même sans dépêcher une équipe gouvernementale pour voler au secours des victimes.
Des Congolais s’interrogent désormais. Car, avancent-ils, ils notent que la République est souvent en alerte quand certains citoyens meurent à Kinshasa ou que d’autres tombent des balles du M23, cette rébellion qui se présente comme une menace contre le régime en place.
Cependant, dénoncent-ils, quand des Congolais meurent égorgés par les ADF, les CODECO, etc., le gouvernement fait preuve de cécité parce que ces groupes armés ne visent pas le renversement des institutions.
« Dans mon pays, les morts ne se valent pas. Un Congolais mort dans la capitale n’a pas la même valeur que celui mort à l’intérieur du pays. D’ailleurs, un seul mort à Kinshasa est plus valeureux que 1000 morts à l’intérieur du pays. Le président de la République et tous ses ministres sont capables de se déplacer pour honorer un Congolais mort (de maladie ou de vieillesse à Kinshasa) mais refuser de sortir même un petit communiqué de condoléances pour 1000 citoyens fauchés par des rebelles », a commenté le journaliste Isaac Kisatiro.
Le même écho est relayé par un activiste de la LUCHA, Bienvenue Matumo qui nuançait après la présence trop remarquée des autorités congolaises, dont le couple présidentiel, aux funérailles de l’épouse du pasteur Marcello.
« Une compassion sélective et urbanisée. Les villageois et les ruraux qui meurent chaque jour à travers des massacres dans les montages et vallées du Kivu n’ont droit à aucune compassion du président de la République? Du 3 au 12 juin, plus de 200 civils ont été massacrés dans les territoires de Beni et Lubero sans que le président « na biso » ne puisse piper mot de compassion et de manifester de la solidarité. Cette irresponsabilité du président sera jugée par l’histoire un jour. Autant le pasteur Marcelo Tunasi a besoin de la compassion autant les autres congolais en ont besoin, surtout ceux qui sont fauchés par incompétences de Félix Tshisekedi », a-t-il écrit sur son compte X.
En un mot comme en mille, par leur attitude, les autorités du pays ont prouvé que les morts n’ont pas la même valeur au Congo et que les victimes de l’intérieur du pays devraient apprendre à compter sur eux-mêmes, plutôt que d’attendre une intervention de Kinshasa.
Charles Mapinduzi
