« Les lois ne sont faites pour être mises dans sa poche et qu’on a le droit de les ressortir quand ça nous arrange », soutient un extrait de la série télévisée « Tyrant ». La République démocratique du Congo est, en effet, à un tournant décisif de son histoire. La loi fondamentale issue du sang et de la sueur des Congolais après le dialogue de Sun-City est aujourd’hui foulée au pied telle une vieille chaussette jetée à la poubelle.
Après la mort de la coalition FCC-CACH en décembre 2020 et la mise en place de l’Union sacrée, des acteurs politiques et de la société, des juristes, des constitutionnalistes ont dénoncé une violation intentionnelle de la constitution par Félix Tshisekedi.
Sans que la constitution ne l’autorise, des députés issus d’un même parti politique ont été permis de choisir la tendance (opposition ou majorité) à laquelle ils appartiendraient mais sans perdre leurs sièges. Ainsi a-t-on vu des députéd du PPRD appartenir, les uns à la mouvance au pouvoir, les autres, à l’opposition.
Pourtant, la loi congolaise tranche que si un élu choisissait de son plein gré de virer vers une autre formation politique, il perdrait illico son siège en faveur du parti politique qui l’a fait élire. Mais, avec l’avènement de Félix Tshisekedi, tout ceci est tombé à l’eau et est ainsi devenu une jurisprudence sur laquelle des politiques surferont constamment pour saper la constitution.
Et, on y est encore. Si en 2020, on aurait cru que le régime avait violé la constitution pour affaiblir Kabila et s’assurer une majorité parlementaire pour mieux gouverner, en 2024, Kinshasa tente le même coup alors que la mouvance qui règne a plus de 400 députés sur les 500 attendus.
Dans une note d’information de l’Assemblée nationale, les députés sont de nouveau appelés à choisir le camp auquel ils appartiendront.
« Le bureau provisoire de l’Assemblée nationale invite chaque honorable député à signer la fiche individuelle d’appartenance à la majorité ou à l’opposition parlementaire », indique le communiqué.
Il s’agit ni plus ni moins d’une démarche qui vise à arracher à l’opposition la dizaine des députés qui lui restent afin de faire de la Chambre basse du Parlement une caisse de résonnance du pouvoir et ainsi fragiliser le débat contradictoire qui doit et devrait y régner.
Peu avant, des opposants craignaient déjà le retour au parti unique comme du temps de Mobutu. L’intention des autorités congolaises à s’approprier la quasi-totalité des députés au Parlement est en soi un acte qui dit tout. Le pays doit se préparer de nouveau à vivre un autre coup d’Etat constitutionnel après celui de 2020 sous le regard inoffensif de ceux qui défendaient bec et ongle cette loi sous l’ancien régime.
Charles Mapinduzi