Eddy Kapend est désormais général de brigade. Celui-ci a été élevé à ce grade à titre exceptionnel dans une ordonnance du président Tshisekedi tard dans la nuit du jeudi au vendredi 20 octobre dernier. Mais, cet ancien colonel de la FAC (Forces armées congolaises) est accusé d’avoir assassiné Laurent Désiré Kabila dans les années 2001 mais a été gracié par l’actuel régime de Kinshasa.
En 2002, à l’issue du procès, Eddy Kapend avait été condamné à mort, dégradé puis chassé de l’armée. Mais, en octobre 2023, par Félix Tshisekedi, il est redevenu militaire par assimilation puis fait général de brigade et placé à la tête des FARDC dans le Haut-Katanga.
Selon l’analyste et historien Benjamin Babunga, il n’y a aucun doute que ce grade de général a été fait porter à un civil. Il est d’accord que la grâce présidentielle n’a pas pour effet juridique l’effacement de la condamnation, mais plutôt la suspension de l’exécution d’une sentence pénale définitive.
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« Seule l’amnistie qui n’est pas un acte administratif (comme la grâce présidentielle) mais plutôt une loi, a pour effet d’ôter exceptionnellement aux faits incriminés leur caractère pénal. Et, partant, la condamnation tombe avec. Celle-ci devient définitivement annulée puisque réputée n’avoir jamais existé* « , mentionne-t-il.
Puis, il indique que quand on est radié de l’armée et condamné à mort, ce n’est pas la grâce qui ramène la personne à vie alors qu’on est réputé professionnellement et même physiquement mort.
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« Le fait de retarder l’exécution de la condamnation à la faveur des instruments internationaux juridiques ratifiés par le pays n’est extinctif ni des faits ni de la condamnation. Normalement, si on se soumet à plus de rigueur dans le raisonnement et dans la qualification de ce qui s’est passé pour Eddy Kapend, il est clair que le président Tshisekedi a, par son ordonnance, ressuscité celui-ci non seulement en lui donnant la vie mais aussi en lui donnant du travail dans un corps (armée) auquel il n’appartient plus depuis 20 ans, mieux, auquel il est réputé n’avoir jamais appartenu dans le passé_ « , écrit-il.
Benjamin Babunga considère Kapend comme un civil ressuscité (puisque considéré comme mort à la suite de sa condamnation à mort) puis incorporé dans l’armée et fait général de brigade le même jour de son incorporation. Il trouve aberrant et déroutant le fait qu’une nouvelle recrue soit nommé général de brigade comme grade de recrutement.
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« Tshisekedi crée des monstres dans l’armée comme il en avait d’ailleurs pris l’habitude. Le cas d’un autre colonel fugitif, le sulfureux colonel John Tshibangu, fait général et commandant région du Kasaï alors qu’actuellement recherché par la justice, était un précédent dangereux* « .
L’historien et analyste constate que Félix Tshisekedi joue beaucoup avec l’armée en la banalisant. Il en tient pour preuve le fait que Christian Tshiwewe a été nommé général d’armée alors qu’il est à la tête d’une armée qui est en guerre depuis près de 3 ans contre une petite rébellion de moins de 5000 hommes qui contrôle plus de 2 territoires du pays et que l’armée qu’il dirige, forte de plus de 80.000 hommes, est incapable d’une moindre victoire depuis.
Parlant d’Eddy Kapend, Benjamin Babunga note que la technique de l’assimilation a été mal comprise et a erronément été appliquées par le chef de l’Etat, cette technique étant elle-même une imagination dangereuse et complète. Puis, il minimise ce qu’est devenu cet ex-compagnon d’arme de Kabila.
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« Pour se faire la conscience tranquille, Tshisekedi a fait recours à ce raccourci en assimilant un civil à un militaire, à qui il a bombardé sans gêne un grade d’officier général. Dans tous les cas, tout le monde sait qu’un général assimilé n’est pas un général dans le vrai. C’est une personne à qui on fait porter les décorations d’un général alors qu’il ne l’est pas. C’est juste pour le besoin de la scène qui dure généralement 2 heures ou le temps de tournage de la pièce de théâtre* « , chute l’historien.
Charles Mapinduzi