En République démocratique du Congo, avant le ring électoral de décembre prochain, le marquoir semble indiquer déjà 8 buts à zéro en faveur du président sortant.
En effet, Félix Tshisekedi paraît bien imbattable. Au pouvoir depuis janvier 2019, le fils du sphinx a réussi à verrouiller le processus électoral en plaçant savamment ses pions sur l’échiquier, lesquels pourraient lui rouvrir les portes du palais pour un nouveau quinquennat en janvier 2024.
A des postes stratégiques qui jouent un rôle central dans les élections, le successeur de Kabila a mis les siens, ceux de sa tribu, ceux de sa province, ceux qui lui sont fidèles et loyaux, quitte à eux de lui faciliter une longévité au sommet de l’Etat, même contre la volonté des Congolais. Des Congolais ont d’ailleurs souvent critiqué la tribalisation des institutions depuis l’avènement de l’UDPS à la tête du pays.
D’abord à la CENI, organe chargé d’organiser les scrutins, Félix Tshisekedi a « placé » le Kasaïen Denis Kadima, bien que ce dernier ait porté les couleurs de la société civile lors de sa désignation. Celui-ci est chargé de proclamer les vainqueurs des élections et a la largesse de tripatouiller les résultats en cas de besoin. Ce qui joue en faveur du régime.
Ensuite, le président congolais a confié les ministres des finances et de l’intérieur à 2 autres Kasaïens, les Kazadi : Nicolas et Peter. Si le premier contrôle les fonds de la République, le second a notamment la police sous son commandement. Deux brèches très importantes que Félix Tshisekedi ne pourrait qu’exploiter pour se maintenir au pouvoir.
Le quatrième pion placé sur l’échiquier par le chef de l’Etat est à la Cour constitutionnelle. Dieudonné Kamuleta. Également Kasaïen comme le président de la République dont il est aussi proche, le président de la Haute Cour est celui qui proclame les résultats définitifs des élections, reçoit et traite les recours. L’avoir dans sa poche, c’est marquer d’avance un but contre ses adversaires.
Puis, il y a Rose Mutombo. La Kasaïenne et ministre de la justice est celle qui trône sur les cours et les tribunaux, pour ainsi dire. En cas de contentieux, son rôle est déterminant et crucial pour trancher, même si dans l’ombre. Sa présence à ce poste est un acquis majeur le pouvoir en place.
Il y a par ailleurs la Kasaïenne Malangu Kabedi à la tête de la Banque centrale du Congo. Là aussi encore, c’est stratégique. De connivence avec le ministre des finances, la patronne de la BCC peut faciliter au candidat président de la République de mener une campagne paradisiaque grâce aux fonds piqués du trésor public.
Bien plus, Félix Tshisekedi a des wewas, ces conducteurs impitoyables des motos-taxis à Kinshasa. A côté, des combattants intolérants du mouvement progressistes de l’UDPS. En mai dernier, lors d’une marche de l’opposition, ces derniers ont déferlé dans les rues de la capitale munis d’armes blanches et prêts à s’attaquer à toute voix discordante. Le régime pourrait bien également appuyer sur ce levier pour faire face à l’opposition congolaise après les élections.
Le 8e facteur sur qui le président congolais comptera est tout également aussi l’armée, l’ANR, etc. Ces services de sécurité sont également un atout majeur qui pourraient déterminer la suite des événements. Le ménage récemment opéré a permis à Félix Tshisekedi de placer un confident à la tête de l’ANR alors que Christian Tshiwewe, son autre très proche, gère l’armée.
La 9e stratégie mise en place par Félix Tshisekedi est sa politique d’encerclement. Le chef de l’Etat a réussi à rassembler autour de lui les principaux acteurs issus essentiellement de l’ancienne opposition et qui seraient prêts à mourir et à mouiller leurs maillots pour faire réélire le président sortant, question de se rassurer qu’ils restent à la table où se partage le gâteau.
Enfin, Félix Tshisekedi pourrait tout naturellement compter sur certaines de ses réalisations au cours de son quinquennat. Même si son bilan est largement critiqué, le successeur de Kabila a de quoi se prévaloir dans certains secteurs de la vie nationale. Ses partisans ont toujours rappelé que grâce à ce régime, l’éducation de base est devenue gratuite sur l’ensemble du pays et que les retombées du programme de développement de 145 territoires sont visibles sur l’ensemble du pays.
Qu’à cela ne tienne, il n’est pas encore temps de proclamer la victoire avant la guerre car l’avenir est toujours imprévisible. En dépit de tout ce dont dispose le FCC de Kabila, Emmanuel Shadari, son dauphin n’est jamais proclamé vainqueur de la présidentielle 2018 grâce à la pression interne et externe.