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RDC : Il y a 20 ans, Laurent Nkunda et Jules Mutebushi, 2 déserteurs FARDC et pions de Kagame, s’emparaient de la ville de Bukavu (retour sur les faits à l’origine du M23)

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Ces tristes événements sont restés gravés dans la mémoire des Congolais qui n’ont pas perdu de vue la spirale de violences qui, depuis, n’ont pas arrêté de déchire l’est du pays.

Le 2 juin 2004, il y a 20 ans et un jour aujourd’hui, 2 hauts officiers de l’armée congolaise choisissent de se retrancher des rangs loyalistes pour combattre les FARDC. Ainsi, ce 2 juin là, ils réussissent à prendre Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu, obligea alors le général Budja Mabe à quitter la ville, lui qui était à la tête de la 10e région militaire.

Pourtant, un peu plus tôt, entre 2002 et 2003, grâce au dialogue inter-congolais de Sun-City, Joseph Kabila venait de mettre fin au déchirement du pays entamé d’abord par l’AFDL de son père en 1996 puis réveillé par le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) qui s’était par la suite métamorphosé en RCD/Goma, RCD/N, RCD/KML, sans oublier tout naturellement le MLC de Jean-Pierre Bemba.

Un an seulement après, soit en 2004, poussé par Kigali, Laurent Nkunda et Jules Mutebushi ont tenté de réveiller le démon en attaquant Bukavu, même s’ils ne tiendront pas longtemps suite à une pression extérieure très intense.

Mais, il faut dire que c’est ce mouvement qui est à l’origine du M23 qui secoue le Nord-Kivu, ces jours. Car, en 2007, le même Laurent Nkunda engagera une nouvelle rébellion contre le Nord-Kivu : le tristement célèbre groupe armé CNDP. Malgré les menaces contre la ville de Goma, il ne réussira guère à la faire passer entre ses mains.

Mais, pour mettre fin au conflit, parce que plusieurs entités étaient sous contrôle des assaillants, un accord sera signé le 23 mars 2009 entre le gouvernement congolais et les hommes de Laurent Nkunda. Pour des raisons de paix, nombreux rebelles non rwandais seront alors intégrés au sein des FARDC avec leurs grades respectifs qu’ils se sont attribués au sein de leur mouvement.

Et, malheureusement, c’est en raison de ces accords signés avec Kinshasa qu’en 2012, les mêmes hommes réapparaîtront au Nord-Kivu sous le motif qu’ils réclamaient la mise en application de toutes les clauses enfouies dans l’accord du 23 mars 2009. D’où l’appellation mouvement du 23 mars, M23.

Défaits en 2013 par l’armée, ils ont de nouveau refait surface en 2021 et contrôlent aujourd’hui des pans entiers du territoire national au Nord-Kivu.

Pour ce qui est de la prise de Bukavu le 2 juin 2004, l’historien Benjamin Babunga revient sur les faits en ces termes :

Ce jour-là, 2 juin 2004, le général Laurent-Nkunda et le colonel Jules Mutebutsi, dissidents des Forces Armées de la République démocratique du Congo (FARDC), prennent le contrôle de la ville de Bukavu, poussant le Général Budja Mabe (Commandant 10è Région militaire) à fuir la ville. Nkunda et Mutebutsi finiront par se retirer de Bukavu le 9 juin.

En quittant de son propre gré la ville le 9 juin (sous la pression de la communauté internationale), Laurent Nkunda affirmera qu’il entendait continuer à protéger sa communauté, victime d’exactions; réclamant la création d’une commission d’enquête sur ces crimes présumés. « Si l’on ne crée pas de commission d’enquête, on va revenir à Bukavu, et on sera en guerre contre le gouvernement », avait-il déclaré, expliquant toutefois qu’il n’entendait pas étendre son intervention à d’autres localités de l’est du pays.

Durant cette occupation de la ville de Bukavu, les soldats de Nkunda et de Mutebutsi commirent des crimes de guerre, y compris des meurtres, des viols et des pillages. Parmi les victimes des affrontements, se trouvait le juge Kabamba, Président de la Cour d’appel de Bukavu, abattu par un ancien colonel du RCD-Goma.

Mais comment en est-on arrivé là?

Tout part de l’année 2002, lorsque le gouvernement central et les rébellions signe l’accord de paix, grâce à l’appui de la communauté internationale. Ces accords aboutissent à la cessation des hostilités et au partage du pouvoir entre les ex-belligérants, notamment de RCD, le MLC et certains groupes Maï-Maï. La logique de 1+4 (1 Président et 4 vice-présidents) pesa fortement sur la cohabitation des officiers militaires issus des anciens belligérants. Au Sud-Kivu, des lignes de clivage entre acteurs politiques et militaires ne tardèrent pas à se faire jour.

A la suite des accords, la 10è Région Militaire (le Sud-Kivu) fut dirigée par un officier du gouvernement de Kinshasa, le général Prosper Nabyolwa (un ex-FAZ récupéré par l’AFDL), secondé par un officier du RCD, le Colonel Jules Mutebutsi. Au niveau de l’administration des territoires d’Uvira et de Fizi, celle-ci fut confiée à des partisans du MLC, secondés par des adjoints issus du RCD. A ce moment-là, la Province du Sud-Kivu est dirigée par le gouverneur Xavier Ciribanya Cirimwami, condamné par contumace courant 2002, à l’instar d’autres officiers du RCD, par la Cour d’ordre militaire de Kinshasa dans l’assassinat du Président Laurent-Désiré Kabila. Joseph Kabila avait accepté, au nom de la paix, de collaborer avec certains politiciens du RCD recherchés pour leur implication dans la mort de son père.

Début 2004, des soupçons selon lesquelles des caches d’armes seraient localisées dans certaines résidences des officiers issus du RCD, déclenchèrent de fréquentes opérations de perquisition, menées par la 10è Région Militaire, commandée par le Général Nabyolwa. La conduite de ces opérations le mit directement en conflit avec son adjoint, le Colonel Jules Mutebutsi, qui s’y opposa vivement. A la suite de l’arrestation, le 21 février 2004, d’un ex-officier du RCD (le major Jeff Kasongo), chez qui il fut trouvé des armes et des munitions, puis de son rapide et controversé transfert à Kinshasa, ce nouveau développement des événements opposa ouvertement Nabyolwa et Mutebutsi, et marqua un début de panique dans la ville.

C’est dans ces circonstances que le Colonel Jules Mutebutsi décide d’attaquer la résidence de son supérieur, le Général Nabyolwa. Il commença d’abord par désorganiser toutes les affectations des militaires dans les postes stratégiques de la ville de Bukavu. Les militaires placés à la Place Mulamba, près de la résidence du Général Nabyolwa, furent éloignés et conduits vers la poste centrale de Bukavu. Ceux affectés aux 2 frontières Rusizi (1 et 2) furent remplacés par des loyaux à Jules Mutebutsi. Ce dernier envoya un autre contingent de militaires à l’aéroport de Kavumu, pour parer à toute éventualité. La nuit du 23 février 2004, la ville de Bukavu fut secouée par des fusillades nourries à l’arme automatique et à l’arme lourde, qui causèrent 3 morts une dizaine de blessés dans la garde rapprochée du Général Nabyolwa. Sa résidence fut littéralement mitraillée.

Une importante mission en provenance de Kinshasa, dirigée par le Général Sylvain Buki (alors Chef d’Etat-Major adjoint des forces terrestres, issu lui aussi de la composante RCD) se rendit à Bukavu, afin d’enquêter sur l’incident de l’attaque de la résidence du Général Nabyolwa, réfugié d’abord dans le bâtiment du Collège Alfajiri, puis évacué quelques jours plus tard par la MONUC pour Kinshasa. Kinshasa décida de remplacer le Général Nabyolwa à la tête de la 10è Région Militaire par le Général Budja Mabe, tout en gardant le Colonel Jules Mutebutsi comme son adjoint. Le Général Buja Mabe décida de poursuivre avec l’opération de fouille des caches d’armes, ce qui déplut de nouveau à son adjoint, le Colonel Mutebutsi.

C’est dans ce contexte de suspicions, d’insurrection larvée et de difficile reprise des affaires sécuritaires par le Gouvernement central de Kinshasa qu’au soir du 26 mai 2004, le Colonel Jules Mutebutsi déclencha les hostilités contre les autres éléments des FARDC, en s’attaquant directement aux militaires au poste frontalier de Rusizi I. Après les y avoir délogés, il étendit ses positions militaires dans la ville, près du Marché de Nguba et de Nyawera, alors que les militaires loyalistes se déployaient dans les environs de la Banque centrale. Tandis que les combats se poursuivaient le lendemain dans la ville, les forces de la MONUC tentèrent de s’interposer entre les belligérants pour un cessez-le-feu, sans y parvenir.

Entre temps, le Général Laurent Nkunda, à la tête de près d’un millier d’hommes armés annonça « porter secours aux Banyamulenge en voie d’extermination » et vint en renfort à partir de la province du Nord-Kivu. Sa progression fut assez surprenante et rapide. En 3 jours, défiant les FARDC en poste à Minova, Kalehe et Kavumu, le Général Laurent Nkunda atteint Bukavu, le 2 juin 2004. Lui et ses hommes occupèrent les collines de Karhale surplombant la ville de Bukavu. Les hommes du Colonel Jules Mutebutsi occupèrent la ville, renforcés par les hommes du Général Laurent Nkunda, obligeant les éléments FARDC à se déployer hors de Bukavu jusqu’au 9 juin.

C’est seulement sous la pression de la MONUC et du CIAT (Comité international d’accompagnement de la transition) que les militaires « insurgés » se retirèrent de Bukavu. Ils laissèrent derrière eux une ville littéralement pillée, le marché central de Kadutu incendié et des dizaines de femmes systématiquement violées.

Charles Mapinduzi

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