Dans le Nord-Kivu, des Congolais se demandent par où est passé Félix Tshisekedi, lui qui, en décembre dernier, y était en tournée électorale avec un discours plein d’espoir et d’assurance. S’était-il servi des citoyens de la contrée comme tremplin pour s’offrir gracieusement un second mandat tout en se moquant intérieurement d’eux? Que des questions sans réponses.
En effet, Félix Tshisekedi demeure aux abonnés absents et refuse toujours de répondre à l’appel. Mais, il n’ignore nullement la situation de l’est. Car, dès 2018, à la conquête de l’électorat pour son premier quinquennat, il avait promis de venir s’y installer personnellement pour suivre la situation de très près. Depuis, plus rien.
En juin 2022, en séjour à Beni, il avait même prétexté et revendiqué l’ignorance : « Je n’étais pas au courant », avait-il dit quand des citoyens du coin lui présentaient leur calvaire. Il avait alors promis de s’impliquer personnellement. Depuis, plus rien. D’ailleurs, il y a quelques mois, le dirigeant congolais a même tranché qu’il n’avait pas besoin de se déplacer dans la zone sinistrée, la technologie ayant déjà évolué.
Effectivement, dans les faits, hormis lors de la campagne électorale, Félix Tshisekedi n’a plus foulé son pied dans la contrée depuis juin 2022. En mai dernier, quand des bombes du M23 sont tombées dans des camps de déplacés à Mugunga/Goma, il a annoncé qu’il écourtait son déplacement en Europe pour venir suivre de près la situation.
Cependant, à la surprise générale, à la place de se rendre dans l’est, lieu du drame, le chef de l’Etat s’est rendu à Oyo, au Congo Brazza, pour un séjour sans enjeux, où son homologue l’a même accueilli au rythme de : « Vous êtes très itinérant, monsieur le président ».
Aujourd’hui, l’actualité sécuritaire congolaise est dominée par le carnage perpétré par les terroristes ADF en région de Beni. Dans une attaque menée contre le groupement Baswaha-Madiwe le 7 juin dans la journée, ces djihadistes ont massacré 93 civils, selon les chiffres provisoires avancés par la société civile locale. Et, depuis mai dernier, les victimes de la même barbarie sont plus de 173.
Mais, en dépit de cette cruauté dont viennent d’être victimes ces Congolais, un silence de cimetière retentit à la présidence de la République. Pour ce qui est du gouvernement, un communiqué laconique de Patrick Muyaya a suffi, communiqué dans lequel Kinshasa minimise le nombre des victimes, parlant seulement de 41 tués.
Dans ce contexte, Félix Tshisekedi s’est invité au stade des Martyrs, déployant un large sourire que les ressortissants du Nord-Kivu considèrent comme narquois et sarcastique. Légitimement, ils se demandent quelle ampleur de carnage il faut contre les Congolais pour que le chef de l’Etat se montre sensible.
L’indifférence de Kinshasa inquiète. Décidément, après le communiqué signé par le ministre de la communion, le pays doit apprendre à tourner la page et à mettre ce nouveau massacre des civils dans le panier d’autres malheurs qui ont déjà affectés la nation : pas de deuil national ni de mesures particulières des dirigeants pour ce qui est de la prise en charge des victimes et même de la sécurisation des populations. A Kinshasa, l’investiture de la nouvelle première ministre doit avoir lieu ce mardi et rien ne doit empêcher le pays de poursuivre sa marche.
Face à cette attitude, des critiques ne tarissent pas. Au Nord-Kivu, des habitants regrettent déjà leurs votes accordés à Félix Tshisekedi alors que 6 mois seulement sont passés depuis la présidentielle. Les 5 prochaines années risquent d’être amères, à moins que les dirigeants décident de recadrer le tir.
Charles Mapinduzi