En sommes-nous à l’étape de vivre enfin la prophétie de Joseph Kabila ? En effet, en décembre 2020, alors que la coalition FCC-CACH était au bord du précipice, l’ancien président prévenait que si la majorité parlementaire venait à être exfiltrée du FCC vers un autre camp, les députés coûteraient énormément cher à la République. Car, entretenir leur loyauté à la nouvelle autorité exigerait des fonds colossaux au trésor public.
Mais, en dépit de l’alerte, l’Union sacrée pour la nation s’était vite constituée autour de Félix Tshisekedi, plusieurs élus ayant décidé de traverser vers l’autre camp, celui du nouveau dirigeant congolais. Et comme on peut se souvenir, il y a quelques mois, à la suite d’un écho lancé par l’opposant Martin Fayulu, le pays était au point de s’arrêter net après avoir été tenu au courant que les députés nationaux étaient grassement payés par le trésor public alors que le peuple croupissait dans la misère la plus sombre.
Aujourd’hui, la guerre de la reconquête du pouvoir est déjà lancée au pays depuis que la commission électorale a sorti sa feuille de route qui fixe la présidentielle au 20 décembre prochain. Donc, dans seulement 4 mois, la République se verra élire ses nouveaux dirigeants à tous les niveaux, dont un autre chef de l’Etat. Mais, Félix Tshisekedi ne se laissera pas faire. Sans nul doute. Lui qui est dans ses droits constitutionnels de briguer un second mandat tient à conserver le fauteuil présidentiel, au prix de grands sacrifices; conserver le pouvoir le plus longtemps possible étant le maître-mot de tous les partis politiques.
À ce sujet, tous les moyens sont donc bons pour y arriver, si l’on s’inscrit à l’école du Prince italien Nicolas Machiavel. Le régime sortant est pertinemment convaincu que la tâche ne sera pas aisée. Car, à côté, de grosses pointures de l’opposition politique fomentent méticuleusement un plan pour éjecter du trône le fils du sphinx. Toutes les précautions doivent ainsi être prises pour s’assurer que la victoire reste dans le camp de la coalition au pouvoir.
Pour y parvenir, les stratèges du régime ont activé un plan : entretenir les poches des élus qui doivent travailler sans relâche pour la réélection du président congolais et leur loyauté à la coalition au pouvoir. Une confidence bien introduite à la Chambre basse du Parlement congolais affirmait que depuis janvier 2023, les députés l’Union Sacrée étaient passés de 21.000 à 35.000$, un salaire qui devrait bien passer à 40.000$ à l’approche des élections, à en croire la même source.
En début de semaine, l’opposant Jean-Marc Kabund, député et ancien vice-président de l’Assemblée nationale a, lui aussi, affirmé devant les juges que les élus étaient à 30.000$ chaque mois. Si donc lors de la tumultueuse question de 21.000$, les députés congolais étaient réputés parmi les mieux payés du monde, les voir à 30, 35 ou 40.000$ chaque mois ferait certainement d’eux les mieux payés de tous les Parlements. « Mais, pour quel travail dont le peuple peut se sentir fier aujourd’hui », peut s’interroger un citoyen lambda.
Malheureusement, au lieu de remplir leur mission de contrôler l’exécutif, la plupart sont devenus une véritable caisse de résonance des gouvernants pour qui ils chantent et dansent au grand détriment leurs électeurs.
Peut-être est-ce même la raison pour laquelle nombreux ambitieux envient d’aller siéger à la Chambre de représentants à Kinshasa. Au regard de la liste publiée par la CENI qui dit avoir réceptionné plus de 28 mille candidatures pour 500 sièges, il n’y a point de doute que les Congolais ont vite réalisé que devenir député sous Félix Tshisekedi est le travail le plus facile mais le plus payant du pays.
Gabriel Musafiri
