La République démocratique du Congo est à un nouveau tournant décisif de son histoire politique depuis que la Commission électorale a rendu publique sa feuille de route pour les scrutins à venir. Si l’on s’en tient donc au chronogramme de la CENI, dans moins de 5 mois, le pays sera appelé à se choisir de nouveaux dirigeants dont le président de la République.
Cependant, l’ombre persiste sur le respect des délais constitutionnels. La CENI fixe au 20 décembre la tenue des scrutins mais le contexte politique, social, économique, financier, logistique et sécuritaire laisse toujours planer un grand doute. On redoute que le rendez-vous soit recalé. Mais, qu’est-ce qui se arriverait si les élections venaient à être repoussées ?
En effet, après près de 60 ans de dures épreuves liées à la mauvaise gouvernance depuis l’indépendance du pays, les Congolais ont espéré un changement radical avec l’avènement au pouvoir du plus vieux parti d’opposition. Hélas ! La situation stagne et les espoirs se sont évaporés. Les mouvements et les combats menés contre les régimes Mobutu et Kabila n’ont plus tardé pour renaître. Le peuple veut impérativement voir la donne changer.
Très assoiffés de ce changement qui tarde à venir, les Congolais ne voudraient certainement accorder aucun chèque en blanc au régime en place. Comme on l’a vécu dans certains pays d’Afrique du Nord et de l’Ouest, d’imprévisibles soulèvements et manifestations pourraient bien s’intensifier au pays pour contraindre les dirigeants à abdiquer. Ce qui plongerait le pays dans un chaos politique et sécuritaire dont la forme est difficile à présager pour l’instant.
Consécutivement, à ce premier scénario, si le pouvoir de Kinshasa s’entête à ne pas courber l’échine, des morts et des blessés pourraient ainsi être déplorés au pays comme cela a été le cas au soir du régime Mobutu ou encore entre 2016 et 2018 vers la fin du régime Kabila. Ce cas de figure sous-entend que les stratèges du pouvoir mettraient en contribution les services de sécurité pour étouffer les manifestations et les mouvements insurrectionnels. Ce qui ferait totalement passer le régime du côté sombre de l’histoire.
Mais, à ce stade, rien ne serait acquis pour Félix Tshisekedi. Les soulèvements populaires pourraient toujours engendre un schéma inédit : chasser le chef de l’Etat, bouleverser l’ordre constitutionnel établi à l’issue de la toute première passation du pouvoir en RDC et ramener le pays à la case de départ : une nouvelle transition avec un nouveau dirigeant.
Un autre scénario, le plus plausible d’ailleurs, est le schéma Joseph Kabila. Ce fut la voie de sortie pour l’ancien dirigeant entre 2016 et 2018 : le dialogue. Pour calmer les tensions et s’offrir un glissement au sommet de l’Etat, Félix Tshisekedi n’hésiterait pas à consulter, mieux, à diviser les acteurs politiques autour du partage du gâteau. Ceci permettrait au régime de taire les dissidences en puisant dans l’opposition et la société civile pour la formation d’une nouvelle équipe gouvernementale.
Un autre éventualité qui n’est pas à écarter est un coup d’Etat militaire. Assimi Goita au Mali, Ibrahim Traoré au Burkina Faso, Mamadi Doumbouya en Guinée ou encore Tiani actuellement au Niger sont des parcours qui ont suscité de l’envie chez les militaires. En RDC, en cas d’une éventuelle désorganisation politique, des éléments de l’armée pourraient bien s’en servir pour rebondir et reprendre les choses en main, mettre en place un conseil de transition et projeter les élections.
Dans tous les cas, il ne s’agit que de simples hypothèses qui pourraient peut-être ne pas arriver car, et la commission électorale et le gouvernement congolais, tous n’arrêtent de faire des garanties que d’ici décembre prochain, le pays se sera doté de nouveaux dirigeants.
Gabriel Musafiri